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Commémoration du "Drakkar" à Papeete: il y a 29 ans 12 enfants du Fenua tombaient au champs d'honneur


Commémoration du "Drakkar" à Papeete: il y a 29 ans 12 enfants du Fenua tombaient au champs d'honneur
A l'initiative de la Fédération nationale des Anciens des Missions Extérieures (FNAME), une commémoration du 29ème anniversaire de l'attentat contre l'immeuble "Drakkar" à Beyrouth (Liban) s'est déroulée ce mardi 23 octobre 2012 aux Monuments aux Morts de Papeete
A cette occasion, M. Philippe LEYDET, Directeur du service des anciens combattants et victimes de guerre de Polynésie française a prononcé une allocution:

"C’est avec une grande émotion que nous rendons aujourd’hui un hommage solennel aux 58 parachutistes français tués dans l'explosion de l'immeuble « Drakkar » le 23 octobre 1983 à Beyrouth.
Beyrouth est alors en proie à une guerre civile sans merci.
Depuis le 20 septembre 1982, à la demande des autorités libanaises, l’ONU a envoyée au Liban une force de maintien de la paix nommée Force Multinationale de Sécurité. Cette force se compose d’Américains, d’Italiens, de Français et de Britanniques.
Ces hommes, membres de la force multinationale de sécurité n'étaient pas là pour gagner une bataille ou une guerre, mais pour mettre un terme à la terreur et à l'horreur des combats fratricides.
Sa mission : aider l’armée libanaise à restaurer l’autorité du gouvernement et assurer la protection de la population.
La Force Française, basée dans la Capitale crée un réseau important de postes militaires auxquels elle attribue des noms de bateaux : pétrolier, caravelle, drakkar…
Situé à Ras-Beyrouth, dans le Sud-Ouest de la ville et au nord de l'aéroport, le « Drakkar » est un immeuble de 9 étages occupé par la troisième compagnie du 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes.
Le samedi 22 octobre, les troupes sont mises en alerte. Le risque d'attentat est maximum.
Au matin du dimanche 23 octobre 1983, à 6h20, un attentat au camion piégé touche l’Aéroport International au Sud de Beyrouth.
241 militaires et marines américains périssent lâchement dans leur sommeil.
Alerté par la détonation, le Capitaine Jacky Thomas, commandant la troisième compagnie, se précipite au balcon.
4 minutes plus tard, à 6 h 24, alors qu'il rend compte à la radio de cet attentat, la communication est interrompue.
L’immeuble du Drakkar vient de se soulever avant de s’effondrer : un camion chargé de plusieurs tonnes d’explosif a éclaté à l’entrée du bâtiment.
L’attentat suicide est meurtrier.
Malgré l’intervention rapide des sapeurs du 17erégiment de génie parachutiste arrivés sur les lieux pour fouiller les décombres, on ne dénombre que 15 survivants.
58 parachutistes français sont retrouvés morts.

Le sacrifice de ces hommes est à jamais inscrit dans notre mémoire.

29 ans après cette tragédie, nous devons nous souvenir.
Nous nous devons d’honorer la mémoire de ces soldats de la Paix qui ont consenti le sacrifice suprême au service de leur pays et au service de la paix au Liban.
Mais à leur souvenir nous ne pouvons qu’associer tous ceux de la 4ème génération du feu.
Depuis ce dimanche sanglant du 23 octobre 1983, 185 de nos compagnons et frères d’armes ont donné leur vie au Moyen orient, en Afrique, en Europe ou bien en Afghanistan pour défendre nos libertés, nos valeurs et parfois seulement le droit à la vie.
Depuis 1962 et la fin des évènements en Algérie, ce ne sont pas moins de 631 soldats français qui ont perdu la vie lors des 126 opérations extérieures menées par la France.
A la mi-août 2012, 6 520 militaires français sont projetés sur 25 théâtres d’opérations.
En d’autres termes, l’armée française est présente sur 25 points du globe, dans des situations de guerre.
Avec les forces de présence, ce sont 10 633 soldats qui servent hors le territoire national.
Depuis 1969, pas une année ne s’est écoulée sans que la France ne soit impliquée dans des conflits, en Afrique, en Europe, au Proche ou au Moyen-Orient, en Asie du Sud-est et maintenant en Lybie.
Mais pour autant, ces conflits ne sont pas connus.
Plus encore, aux yeux de l’opinion publique, les derniers anciens combattants sont les vétérans de la guerre d’Algérie.
Ce n’est qu’au prix d’un effort de remémoration que le public veut bien considérer qu’effectivement, depuis 1962, la France est en guerre.
Cependant, les seuls conflits qu’alors la conscience collective reconnaît sont les guerres du Liban, de Yougoslavie, du Golfe, et celles, contemporaines, d’Afghanistan et de Lybie.
Quant à la guerre du Tchad, la plus longue qu’ait connue la France au XXe siècle, elle est oubliée.
Quant aux conflits successifs du Congo, auxquels la France a pris part, et qui ont été parmi les plus meurtriers de l’histoire de l’humanité, ils sont totalement ignorés.
On connaît le génocide rwandais, mais on ne sait pas que la France a été présente au Rwanda afin de tenter d’empêcher de tels massacres.
On connaît la situation critique en Côte d’Ivoire, mais on ne sait que pas que, là encore, la France a été impliquée depuis 2002 dans le conflit, et que la mission Licorne date de 2004.
Il faut cependant rappeler ces conflits – les soldats français qui y ont participé ont servi la Nation française, quelles qu’aient été les raisons de ces guerres.
Il faut dire à propos des conflits du Liban, de Yougoslavie, de Côte d’Ivoire, l’étonnante métamorphose des interventions françaises – glissant d’une logique de guerre frontale à une stratégie de maintien de l’ordre.
A partir de 1978 et de la guerre du Liban, ces opérations extérieures se sont inscrites dans le cadre de la légalité internationale.
Peu à peu, les militaires français ont été intégrés à des forces internationales ; peu à peu, leurs missions ont évolué, la dimension simplement létale de la guerre s’assortissant d’une dimension nouvelle, proche de l’humanitaire ou des opérations de police ; peu à peu, leurs buts se sont transformés, n’ayant plus grand-chose à voir avec la recherche d’une victoire tactique où l’ennemi devrait être vaincu, mais tendant de plus en plus à préparer la sortie de crise, le retour à la Paix.
Le mot doit donc être employé – les militaires français, au XXIe siècle, sont appelés à devenir des soldats de la Paix.
Paradoxe ?
Que le monde puisse être, un jour, régi par le Droit, et non par la force, implique que la force soit employée de manière raisonnée, dans un cadre légal, pour préserver la Paix.
L’épopée des soldats de la 4ème génération du feu (« casque bleu » ou intervenant sous le couvert de l’OTAN) n’en est encore qu’à ses débuts.
Aujourd’hui souvenons-nous que la Démocratie, la Liberté et la Paix ne sont jamais définitivement acquises.
En ce jour nous souhaitons rendre hommages aux familles et à la mémoire des nombreux soldats de la 4ème génération du feu qui au Liban et de par le monde, ont sacrifié leurs vies pour elles et sont morts pour la France.

Souvenons-nous plus particulièrement de nos enfants du Fenua tombés aux Champs d’Honneur et Mort pour la France :
Caporal Robert MAIORO (Liban) 2ème REI 1983
Caporal Joseph TEHIVA (Tchad) 21ème RIMA 1990
Caporal Marcel AMARU (Bosnie) 3ème RIMA 1995
Légionnaire Tamuera TUMATARIRI (Yougoslavie) 2ème REP 1996
Sergent-chef (A) Jean-Pierre TERIIEROOTERAI (Bosnie) BA 217 Brétigny 1999
Caporal-chef Johnny TUPANA (Haïti) 3ème REI 2004
Sergent-chef Eric BURY (Côte d’Ivoire) 1er RCP 2005
Capitaine Laurence BRIANÇON (Sinaï) BA 118 Mt de Marsan 2005
Maître-principal Loïc LEPAGE (Afghanistan) Commando TREPEL 2006
Caporal Alexis TAANI-PERRIN (Afghanistan) 8ème RPIMA 2008
Maréchal des logis Michael SHIGETOMI (Gabon) 13ème RDP 2009
Maître Théophile HOATA (2011) (Lybie) frégate « Georges Leygues »

Et ayons également une pensée pour nos blessés :
Caporal-chef Loïc MARCHAND (2008) 8ème RPIMA
1ère Classe Jean-Christophe PAMBRUN (2008) 8ème RPIMA
1ère Classe Rudolphe VERDET (2008) 8ème RPIMA
Marsouin Lucien TAURAA (2009) (Afghanistan) 3ème RIMA
Caporal Tevanui ROCHETTE (2011) (Afghanistan) 19ème RG
Caporal-chef TIARE Vaiarii (2011) (Afghanistan) 1er RCP

SOUVENONS-NOUS D’EUX"

Philippe LEYDET
Directeur du service des anciens combattants et victimes de guerre en Polynésie française


Rédigé par communqiué du BCI le Mardi 23 Octobre 2012 à 11:24 | Lu 1544 fois