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Budget 2015 des outre-mers : deux députés polynésiens sur trois l'approuvent


Jonas Tahuaitu a été le plus critique dans son analyse du budget 2015 pour l'outremer. Il a d'ailleurs voté contre alors que tous les autres députés UDI ont voté pour.
Jonas Tahuaitu a été le plus critique dans son analyse du budget 2015 pour l'outremer. Il a d'ailleurs voté contre alors que tous les autres députés UDI ont voté pour.
PARIS, le 4 novembre 2014. Le budget ultramarin pour 2015 a été adopté ce mardi par les députés à Paris. Le groupe UDI auquel appartiennent les députés polynésiens a voté favorablement avec la grande majorité des parlementaires de gauche. Exception notable toutefois : Jonas Tahuaitu a voté contre.

C'est un budget ultramarin qualifié par les élus de gauche et de droite de "préservé" qui a été adopté pour 2015. Aussi, les députés ont exprimé plutôt leur satisfaction. Philippe Gomes, le député de Nouvelle-Calédonie, rapporteur pour le groupe UDI apporte néanmoins un bémol sur la continuité territoriale dont les crédits subissent en 2015 une baisse de près de 20 % "ce n’est pas à vous que je vais apprendre combien coûtent les billets pour la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie (…) Enfin, des efforts sont demandés à la Polynésie française. Elle est prête à y participer car elle souhaite contribuer à l’effort national. N’oublions pourtant pas sa situation de fragilité économique et sociale, depuis près d’une décennie. La politique d’assainissement des comptes dans laquelle elle s’est lancée nécessite un accompagnement particulier de l’État".

Dans la discussion générale, les députés polynésiens ont pris la parole. Maina Sage s'est inquiétée d'une baisse importante des autorisations d'engagement pour le contrat de projets. "Nous manquerons sérieusement de crédits pour engager des opérations tout à fait prioritaires pour la collectivité en matière de logement social et de santé" a rappelé l'élue. Jonas Tahuaitu est allé plus loin : " Un examen attentif des crédits de la mission que vous défendez et de l’ensemble des missions du projet de loi de finances pour 2015 nous laisse penser que cet accompagnement ne se fera pas en 2015".

La ministre George Pau-Langevin n'a pas répondu directement à cette critique. Elle rappelle que la Polynésie a obtenu une dotation exceptionnelle en 2012 et une avance de trésorerie en 2013. " Cette dernière est donc assez bien traitée en termes d’évolution de ses dotations (…) Nous avons rencontré le président Fritch et les parlementaires et sommes sur un chemin très fructueux de collaboration apaisée et positive avec la Polynésie". La ministre des outre-mers assure enfin que le nouveau contrat de projets devrait être doté, comme le précédent d'une enveloppe de 177 millions d'euros sur les cinq prochaines années.

Dans un communiqué adressé aux rédactions ce mardi après-midi, la Présidence de Polynésie, fait un compte-rendu de ce vote à l'Assemblée nationale, pour lire le communiqué, CLIQUER ICI

EN CHIFFRES


Une dotation globale d’autonomie de 84,5 millions d'euros (10 milliards de Fcfp) est versée directement à la Polynésie française. La dotation territoriale d’investissement versée aux communes représente 9 millions d'euros (1 milliard de Fcfp), enfin la contractualisation sur les projets d’investissement prioritaires est de 51,3 millions d'euros (6,1 milliards) en autorisation d'engagement pour l'année 2015.


Déclarations des députés polynésiens au sein de l'hémicycle national et la réponse de la ministre des outre-mers


MAINA SAGE

Nous sommes aujourd’hui au rendez-vous des promesses et des longues discussions que nous avons eues pour la préparation de ce budget.

Je tiens au préalable à observer que le budget des outre-mer est stable, voire en légère augmentation, ce qui est une bonne chose pour l’ensemble des Ultramarins ici présents. Dans le détail, on observe cependant des coupes budgétaires dans certains programmes, notamment pour ce qui concerne la défiscalisation et la continuité territoriale, comme nous l’avons déjà souligné. Nous espérons que vous pourrez renforcer ces crédits cette année ou l’année prochaine.

Pour ce qui concerne la Polynésie, j’évoquerai le contrat de projet et la DGA. Concrètement, le contrat de projet fait l’objet d’une coupe de 20 % des autorisations d’engagement. Comme je l’ai expliqué en commission et auprès du ministère de l’outre-mer, nous insistons pour que les autorisations d’engagements soient revues à la hausse, car certaines opérations sont d’ores et déjà prêtes à démarrer et, contrairement à ce que laissent penser les estimations faites à Paris, nous manquerons sérieusement de crédits pour engager des opérations tout à fait prioritaires pour la collectivité en matière de logement social et de santé. Le Gouvernement peut-il revenir sur cette baisse affectant le contrat de projet ?

Quant à la DGA, sur laquelle je reviendrai tout à l’heure à l’occasion d’un amendement d’appel, nous nous réjouissons du maintien de ses crédits, mais que pèse aujourd’hui l’outre-mer dans le PIB national ? Ramené aux dépenses de l’État, quel est l’effort réellement consenti pour assurer une solidarité plus forte en faveur des territoires d’outre-mer, peut-être plus vulnérables encore que l’Hexagone ? Cette question s’adresse notamment à M. le secrétaire d’État chargé du budget, que nous avons la chance d’avoir parmi nous. Ces indicateurs économiques sont utiles pour mener à bien la réflexion sur l’effort réel réalisé par la nation en faveur de l’outre-mer.


JONAS TAHUAITU

Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter, madame la ministre, pour ce premier budget des outre-mer que vous présentez. Un tel exercice, dans le contexte budgétaire actuel de la nation, n’est pas chose facile. Félicitations également pour la révision du dispositif des cessions à l’euro symbolique des immeubles domaniaux inutiles de l’armée au tribunal foncier de la Polynésie.

Merci pour l’appui technique des ministères et des services nationaux sur des dossiers tels que ceux du taux de participation de l’État au financement du régime de solidarité de la Polynésie ou de la proposition d’adaptation des règles de succession, qui sera présentée prochainement – autant d’avancées législatives et de rapports d’experts pour la Polynésie française qui, s’ils ne font pas tous plaisir, font au moins sourire.

Malheureusement, sans soutien financier, ni plan d’action concret, ni partenariat rénové, ces textes resteront des mots. Or la Polynésie a besoin de bien plus. Elle a besoin d’un accompagnement fort et massif de ses politiques sectorielles pour la croissance, l’emploi, la santé, la gestion du foncier, le logement social, l’éducation, l’écologie, les transports et la lutte contre la vie chère. Elle a besoin d’un accompagnement pour maintenir la dynamique impulsée en mai 2013 par le président Flosse et animée aujourd’hui par son successeur, conformément aux engagements pris par le Tahoeraa Huiraatira devant la population polynésienne.

Les efforts de redressement, les Polynésiens s’y résignent, et même doublement car, en plus de participer à celui des comptes publics de la nation par le biais de la baisse de la DGA, ils participent également à celui des comptes d’une Polynésie laissée au bord de la faillite par l’ancienne majorité locale. Un examen attentif des crédits de la mission que vous défendez et de l’ensemble des missions du projet de loi de finances pour 2015 nous laisse penser que cet accompagnement ne se fera pas en 2015. Madame la ministre, après tous nos efforts, pouvons-nous espérer un accompagnement plus juste en 2016 ?

JEAN-PAUL TUAIVA

Madame la ministre, je reviendrai sur la question du logement, à propos de laquelle je vous ai vue gesticuler tout à l’heure. Compte tenu de la situation politique et économique qu’a subie la Polynésie ces dix dernières années, ce secteur est particulièrement sinistré. Alors que nous produisions précédemment entre 600 et 800 logements par an, nous avons aujourd’hui plus de 6 000 dossiers en souffrance et nous avons besoin de votre aide. Nous souhaiterions à ce propos un engagement fort de l’État. Que peut faire le Gouvernement pour nous aider dans ce domaine, notamment en matière de logement social et de logement intermédiaire ?

Par ailleurs, mes collègues de l’UDI, notamment du Pacifique, et moi-même lançons depuis deux ans des mises en garde à propos du logement intermédiaire. Le plafonnement à 10 000 euros du dispositif en faveur de l’investissement locatif intermédiaire nuit considérablement à l’attractivité de ce dispositif. Il est urgent de porter ce plafond à 18 000 euros afin de relancer la construction de ce type de logements outre-mer et de permettre ainsi à nos concitoyens un meilleur parcours locatif.

Les amendements que nous avions déposés l’an dernier et cette année en première partie du projet de loi de finances n’ayant pas été adoptés, nous reviendrons à la charge lors de la navette parlementaire. Pouvez-vous nous apporter votre soutien à cet égard ?

GEORGE PAU-LANGEVIN

Madame Sage, en réponse aux inquiétudes que vous exprimez, je rappellerai que, le contrat pour 2008-2013 ayant connu des retards d’exécution, l’État a majoré exceptionnellement la dotation en 2014, afin d’en améliorer le taux final d’exécution. Ce sont ainsi 177 millions d’euros qui ont été inscrits pour une période de six ans. À ma connaissance, le nouveau contrat bénéficie des mêmes montants et ne connaît aucune diminution. Nous avons inscrit ce montant de 177 millions d’euros sur cinq ans, au lieu de six ans précédemment, et suivrons cette question avec beaucoup d’intérêt.

Ce qui vous inquiète, c’est que nous avons diminué la dotation de crédits en autorisations d’engagement. Or, nous avons cependant précisé que, si la dotation allouée se révélait insuffisante, nous pourrions allouer une dotation complémentaire afin de pouvoir fermer l’exercice. Vous n’avez donc aucune inquiétude à avoir.

Je peux également ajouter que, conformément aux échanges que vous avez eus avec mon cabinet, si l’exécution des projets du contrat de développement permet l’engagement des 25 millions d’euros de crédits en autorisation d’engagement, le ministère de l’outre-mer positionnera en gestion 2,6 millions d’euros supplémentaires à partir de septembre 2015. Une hausse significative des crédits de paiement de surcroît doit donc vous permettre de mener à bien les opérations que vous souhaitez.

Pour ce qui est de la continuité territoriale, je suis consciente de la question qui se pose à cet égard en Polynésie. Lorsque nous avons revu la continuité territoriale, nous avons fait en sorte de sauver dispositif. Aucun dispositif budgétaire, quel qu’il soit, ne peut en effet connaître une augmentation exponentielle et non contrôlée. Si donc les crédits connaissent bien une diminution sévère, l’important est que nous ayons sauvegardé la continuité territoriale pour des motifs de formation et d’accès à l’emploi.

Je suis cependant prête à évoquer à nouveau ce dispositif, dont certains éléments sont à revoir. Le plus injuste est en effet qu’il fonctionne dans un sens, mais pas dans l’autre, ce qui se traduit par une continuité territoriale intermittente. Je le répète : je suis disposée à y réfléchir, mais l’important était de sauvegarder ce dispositif pour des motifs essentiels. Lorsqu’une région – je pense évidemment à la Réunion – consacre autant d’argent aux voyages, elle pourrait également en consacrer à l’emploi, sujet essentiel dans les outre-mer.

Monsieur Tahuaitu, je vous remercie d’avoir exprimé votre appréciation de l’action du Gouvernement. De telles appréciations sont toujours très positives pour nous. Nous avons tenu, même si cela n’est pas toujours perçu comme suffisant, à réaffirmer la solidarité à laquelle la Polynésie a droit et avons rétabli des crédits, en procédant notamment à une dotation exceptionnelle de 50 millions d’euros en 2012 et à une avance de trésorerie de 42 millions d’euros en 2013, alors que la période précédente avait vu une diminution importante des crédits destinés à la Polynésie française.

Cette dernière est donc assez bien traitée en termes d’évolution de ses dotations, comme je viens de le rappeler à Mme Sage. Nous consacrons en effet les mêmes crédits que précédemment au prochain contrat de développement, nous avons sauvegardé le dispositif de défiscalisation des investissements dans les collectivités d’outre-mer et mettons en place des contrats de redynamisation des sites de défense en Polynésie française. Nous avons rencontré le président Fritch et les parlementaires et sommes sur un chemin très fructueux de collaboration apaisée et positive avec la Polynésie.

Monsieur Tuaiva, vous avez évoqué les logements sociaux et les logements intermédiaires, qui ont préoccupé à juste titre les élus du territoire. En Polynésie, le logement social a été un axe majeur du contrat qui s’achève, à hauteur de 37 % de la programmation. Il y a cependant eu, entre la programmation et l’exécution, une différence importante. Nous sommes donc prêts, aujourd’hui, à accompagner la relance du logement social en Polynésie. L’AFD a récemment accordé une aide de 7 millions d’euros à un programme qui bénéficiera à 200 familles. Le logement social sera également l’axe du prochain contrat. Nous avons rencontré récemment Mme Iriti, sénatrice de Polynésie, qui nous a interpellés quant à la possibilité de modifier les règles relatives notamment à l’habitat dispersé, afin de faciliter les opérations. Nous examinons toutes ces questions.

Surtout, le Premier ministre nous a autorisés à renforcer l’attractivité du dispositif Pinel en outre-mer. Alors que nous avions déjà obtenu le maintien d’un différentiel de réduction d’impôt de 11 points sur toutes les durées d’amortissement, je puis aujourd’hui vous confirmer que le Gouvernement a fixé à la réduction d’impôt en faveur de l’investissement locatif intermédiaire un plafond de 18 000 euros, comme le demandaient les parlementaires, au lieu de 10 000 euros précédemment. Nous avons donc avancé et c’est là un bon résultat.

Pour lire l'intégralité des débats à l'Assemblée nationale de ce mardi 4 novembre 2014, SUIVRE LE LIEN EN CLIQUANT ICI

Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 4 Novembre 2014 à 14:22 | Lu 3505 fois