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Air Tahiti : les détails du plan social


Ici, les grévistes de Rurutu
Ici, les grévistes de Rurutu
PAPEETE, le 31/05/2016 - S'il y a bien un sujet qui divise encore les syndicalistes et la direction d'Air Tahiti, c'est bien le plan social. Depuis le début de la grève qui sévit au sein de la compagnie aérienne locale, on nous parle d'une baisse du temps de travail et des salaires du personnel dans les archipels éloignés. Nous nous sommes procuré le protocole d'accord qui a été signé le 1er février dernier, dont voici les détails.

Le sujet fait débat depuis quatre ans déjà, et un protocole d'accord a été signé entre la direction d'Air Tahiti et quatre organisations syndicales (CSIP, SPSA/PF, SATA et la CSTPFO), le 1er février dernier.

En préambule de ce protocole d'accord, la direction justifie ce plan social par une forte baisse de ses trafics depuis 2009. En 2011, la compagnie a progressivement réduit son activité, elle a également vendu un de ses appareils. "Mais cela n'a pas suffi à endiguer les pertes d'exploitation".

Ce qui a entrainé une réduction des coûts fixes "notamment le poste de charge "masse salariale"". Les effectifs ont été réduits "en douceur", notamment dans les gros services opérationnels. Là, où il y a eu des départs naturels, les postes ont été fermés ou le temps de travail a été réduit.

La baisse de l'activité se fait aussi sentir sur les îles peu fréquentées. Et, malgré la rentabilité sur certaines lignes, cela ne suffit pas à combler les pertes.

160 SALARIES CONCERNÉS PAR CE PLAN SOCIAL

Les mesures de réduction des temps de travail concerneraient 39 escales ce qui représenterait 160 salariés. "Ces salariés travaillent à temps partiels à raison de 8 heures à 52 heures par mois. Le salaire mensuel moyen brut est de 68 000 Fcfp", expliquent les syndicalistes.

Les salariés concernés ont donc reçu une proposition de modification de leur contrat de travail "au niveau du temps de travail retenu. Ils bénéficient d'un délai d'un mois pour donner leur réponse", précise le protocole d'accord. "Pour celles et ceux qui refusent ce nouveau contrat, ils sont licenciés économiquement", prévient Michel Toomaru, secrétaire général du syndicat autonome du personnel aéronautique des îles (SAPAI).

Une réduction du temps de travail se traduit bien évidemment par une baisse de salaire, et pour mieux accompagner ses salariés, la direction a décidé de leur verser une indemnité "qui est calculée sur la différence du salaire brut (salaire de base + ancienneté + prime de fonction) entre le temps de travail contractuel et le nouveau temps de travail défini."

"Prenons l'exemple d'un salarié à 26 heures par mois", indiquent les syndicalistes, "son salaire de base est de 23 525 Fcfp niveau 1 échelon 1. Avec ce projet, son temps de travail serait ramené à 8 heures par mois et son salaire de base passerait à 7 239 Fcfp par mois, soit une baisse de salaire de 70 %".

En plus de son nouveau salaire, ce salarié percevra une indemnité de réduction de temps de travail. Deux choix lui sont donc proposés : soit cette indemnité lui est versée en une seule fois, ou soit, elle est versée de manière dégressive pendant 24 mois sur son salaire.

Des mesures d'accompagnement seront mises en place pour le personnel concerné :
- Des formations auprès du SEFI et des organismes de formation pour celles et ceux qui souhaitent une reconversion.
- La société appuiera auprès des banques toute demande de rééchelonnement de prêts et elle accompagnera les salariés pour faciliter les démarches.
- Une prime de départ sera attribuée aux salariés qui partiront à la retraite ou qui quitteront l'entreprise.

Pour aller à la rencontre des 160 salariés, un calendrier des entretiens individuels sera communiqué aux délégués syndicaux. Un point que Marianne Snow, secrétaire général du syndicat autonome du transport aérien (SATA) dénonce aujourd'hui. Selon la direction, des modifications ont été apportées sur le calendrier "sans en avertir les syndicalistes".

Pour Michel Toomaru, la compagnie veut récupérer ce qu'elle a perdu, ce qui représenterait plusieurs centaines de millions. "En mettant en place ce plan social dans les archipels éloignés, ils récupèreront 60 millions. Cela ne suffira même pas à combler toutes les pertes", explique-t-il. "Après nous, ils iront gratter ailleurs".

Les syndicalistes ne veulent pas de ce plan social, ils suggèrent à la direction de trouver d'autres mesures pour faire des économies sans toucher les petits salaires. Du côté de la direction, aucune autre solution alternative n'est possible.

Les syndicalistes appellent d'ailleurs le Pays et l’État à intervenir sur ce sujet, car, selon eux, le facteur humain n'est pas pris en compte.

Michel Toomaru
Secrétaire général du syndicat autonome du personnel aéronautique des îles (SAPAI)

"On défend notre salaire tout simplement"


"Dans le plan social, j'ai évoqué quatre problèmes qui nous incombent :
- La baisse du salaire : c'est toute une réorganisation au sein de nos familles. En tant que salarié d'Air Tahiti, je suis obligé de me réorganiser sur les dépenses (eau, EDT, l'école, les enfants qui viennent sur Papeete…)
- la couverture sociale : aujourd'hui on est salarié à Air Tahiti, mais on a une couverture sociale au RST. Depuis l'année dernière, on a toujours été au RST. Avec le nouveau système que la CPS a mis en place en 2016. Quand on dépasse un seuil, cela veut dire que nous sommes obligés d'aller en RNS. C'est inacceptable, on n'arrive pas à régler ce problème. J'en ai fait part à notre comité d'entreprise. Il fallait une étude approfondie sur le salarié et cela n'a pas été fait. On met un plan social en route sans prendre en compte les conséquences sur les salariés.
- le stress : cela va engendrer des maladies sur le personnel parce qu'ils ont des échéances à payer. Comment ils vont faire si on baisse leur salaire ? Donc ils ne vont plus se retrouver. Il y a les dettes à payer et les dépenses de la famille…
- présenter ce projet au comité CHSCT et cela n'a pas été fait. Cette commission analysera au cas par cas les conséquences que ce plan social engendrera sur le personnel.

On tient à s'excuser auprès de la population, mais il faut nous comprendre. Nous ne demandons pas une augmentation de salaire, on refuse tout simplement le nouveau temps de travail. C'est vrai qu'ils ont chiffré et ils ont vu des déficits sur ces îles, mais ce déficit date de 2014. Aujourd'hui, on est en 2016 et la compagnie est excédentaire de plus d'1 milliard. Et maintenant ils veulent baisser nos salaires. Je tiens encore une fois à m'excuser auprès de la population. On défend notre salaire tout simplement.
"

La couverture sociale dans la ligne de mire

En 2016, la CPS a apporté des modifications pour bénéficier du régime de solidarité territorial (RST). Le plafond mensuel ne devra pas excéder les 87 346 Fcfp. Et c'est là que le bât blesse pour le personnel d'Air Tahiti, dans les archipels éloignés. Selon les syndicalistes, le personnel dans les îles est affilié au RST, mais avec les nouvelles conditions qui ont été mises en place par la CPS, toutes celles et ceux qui perçoivent plus de 87 346 Fcfp seront affiliés d'office au régime des non-salariés (RNS). "Le patron va continuer à payer notre assurance maladie, notre retraite mais en plus de cela, on sera obligés aussi de payer notre assurance maladie", explique Michel Toomaru.

Programme des vols prévus pour ce mercredi :

- Desserte des Iles-sous-le-vent : Bora Bora, Huahine et Raiatea
- Desserte des Tuamotu : Fakarava, Rangiroa et Tikehau
- Desserte des Marquises : Hiva Oa et Nuku Hiva
- Annulation des vols au départ ou à destination de Moorea
- Annulation des vols Aratika, Arutua, Kauehi, Kaukura et Katiu, ainsi que des vols Australes



le Mardi 31 Mai 2016 à 15:46 | Lu 4525 fois