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Affaire des douaniers : l’avocat général requiert les mêmes peines qu’en première instance (MàJ)


PAPEETE, 17 mai 2017 - Depuis lundi, le procès de l’affaire dite "des douaniers" occupe la Cour d’appel de Papeete. Mercredi, lors de ses réquisitions, l’avocat général a réitéré les demandes de peines prononcées en correctionnelle, le 26 juillet dernier. La cour d'appel rendra sa décision le 24 août.

Alors que 17 individus, dont 11 douaniers, sont en attente de leur jugement en appel pour des faits d’importation sans déclaration de marchandise fortement taxée, d’usage de faux en écriture, de concussion, d’abus de confiance et de recel d’abus de confiance, l’avocat général a exposé ses réquisitions, mercredi après-midi.

Après avoir rappelé les faits qui remontent à 2010, le représentant du ministère public a requis des peines similaires à celles relatives aux délibérés de première instance à l’encontre des principaux accusés :
- Daniel D. : 2 ans de prison avec sursis, 1 million d’amende et l’interdiction d’exercer la profession de douanier.
- Guy G. : 18 mois avec sursis, 1 million d’amende et l’interdiction d’exercer la profession de douanier pendant 5 ans
- Jessie J. : 18 mois avec sursis, 1 million d’amende et l’interdiction d’exercer pendant 5 ans.
- Gabriel M. : 3 ans avec sursis, 3 millions d’amende et l’interdiction définitive d’exercer.
- Georges S. : 18 mois avec sursis, 1 million d’amende et l’interdiction d’exercer pendant 5 ans.
- Jocelyn U. : 18 mois avec sursis, 1 million d’amende et l’interdiction d’exercer pendant 5 ans.

A l’encontre des autres prévenus, l’avocat général a requis des peines allant de 2 à 8 mois de prison avec sursis ainsi que des interdictions d’exercer de 1 à 2 ans.

Mais le réquisitoire du représentant du ministère public a surtout été marqué par une demande de requalification des faits "d’importation sans déclaration de marchandises fortement taxées" en "importation réputée de marchandises prohibées".

Notons que les premières plaidoiries de la défense tendent toutes à s'interroger sur la véracité des déclarations du garagiste de Paea, Alexis G, qui avait initialement été mis en examen pour trafic de stupéfiants. Les déclarations de ce dernier avaient orienté l’instruction vers les faits reprochés aux douaniers. Par ailleurs, on reproche collectivement aux prévenus des infractions dont on ne peut établir la participation et la responsabilité individuelle.

La cour d'appel rendra sa décision le 24 août.

Interview de Gilles Jourdaine, avocat de l’un des douaniers.

Que pensez-vous des réquisitions faites par l’avocat général ?
La défense a été extrêmement surprise par la production d’une demande de requalification des infractions douanières juste avant les réquisitions du ministère public dans la mesure ou le tribunal avait statué sur la base de l’ordonnance de renvoi qui concernait des marchandises fortement taxées. En première instance, le tribunal avait relaxé les poursuites basées sur cette infraction et, pour tenter de sauver les meubles, l’avocat général a aujourd’hui tenté de pallier à cette difficulté procédurale en présentant une demande de requalification. La défense a donc fortement réagi car cette demande n’a permis ni aux avocats, ni aux clients de pouvoir étudier la question. C’est une sorte de coup de théâtre tendant à faire condamner à tout prix ces douaniers sur la base d’une infraction pénale.

Comme l’a laissé entendre l’une de vos confrères, à vos yeux, cela remet en cause la question d’un procès équitable ?
Totalement puisque la cour de cassation sanctionne ces requalifications qui sont ordonnées dans le cadre de la requalification élargie dès lors qu’elle n’a pas donné lieu à la possibilité, pour la défense, d’en discuter. Cela est sanctionné par la plus haute juridiction ainsi que par la cour européenne des Droits de l’homme qui considère que c’est un acte déloyal dans le cadre du procès.

Comptez-vous vous pourvoir en cassation ?

Cela dépendra effectivement du sort réservé à cette demande de requalification. Comment la cour réagira-t-elle ? Nous déciderons d’un éventuel pourvoi cela à l’issu des délibérés.

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 17 Mai 2017 à 17:00 | Lu 5963 fois