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Affaire OPT : "il y a là une atteinte à une liberté fondamentale" selon Me Quinquis


Gaston Flosse salue son avocat Me François Quinquis
Gaston Flosse salue son avocat Me François Quinquis
PAPEETE, le 23 juin 2014 - Ce lundi matin, en préambule de l’instruction à l’audience du procès en appel de l’affaire de corruption de l'OPT, les débats se sont attardés sur les questions de forme. La défense de Gaston Flosse et de Geffry Salmon a soulevé une question procédurale, avec l’évocation d’exceptions de nullité visant la qualité de rédaction de l’Ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (ORTC).

Les avocats de Gaston Flosse et Geffry Salmon s’appuient sur un problème de forme pour demander la nullité de la procédure. Leurs arguments :

Me Quinquis, avocat de Gaston Flosse
« (Des articles du Code de procédure Pénale et de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme) encadrent les procédures pénales et notamment les instructions judiciaires de telle façon que les débats soient équilibrés et loyaux. A partir du moment où un justifiable est renvoyé devant une juridiction répressive et que l’on demande contre lui des sanctions extrêmement lourdes, et qu’il ne sait pas pourquoi il est accusé, par définition il ne peut pas correctement se défendre et par voie de conséquence il y a là une atteinte à une liberté fondamentale. C’est ce contre quoi je m’élève et ce que je demande à la Cour d’appel de bien vouloir constater. »
L’avocat assure que l’ordonnance parle de corruption passive de 1993 à 2006 sans préciser dates, contrats précis ou montants exacts. « Toutes ces accusations sont beaucoup trop générales pour que M. Flosse puisse se défendre utilement, ce qui est contraire à toute société de droit et surtout à l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Et sur la qualification des faits : nous avons eu droit pendant toute la période de l’instruction au vocable « corruption passive », soudainement ce vocable est changé et on nous dit « finalement ce n’est pas en raison de ses fonctions mais en raison de sa qualité que l’on poursuit M. Flosse, c’est un trafic d’influence ». Qu’on nous fasse le distinguo entre un abus de fonction ou de qualité ! En l’espèce rien n’est indiqué dans l’ordonnance de renvoi, c’est un simple artifice. »
Le conseil juridique nie que sa démarche soit une manœuvre destinée à gagner du temps : « Le fait de plaider les droits de la défense, c’est-à-dire de garantir les libertés individuelles, ne peut pas être assimilé à une quelconque volonté dilatoire (chercher à gagner du temps). C’est véritablement dans l’intérêt de tous les justiciables. La sanction de tout cela se limite simplement à ce que nous soyons amenés à nous retrouver dans quelques mois. Maintenant il faut bien voir, si la Cour venait à nous donner raison, elle ferait preuve d’un courage que je tiens à saluer par avance. »
Et si jamais il n’a pas gain de cause, Me Quinquis assure : « nous examinerions d’abord la possibilité de former un pourvoi en Cassation de façon immédiate, ensuite nous accepterions d’être jugés sur le fond, cela va de soi. Comme en première instance, mais avec un certain nombre de confusions puisque nous ne saurions pas ce qui nous est reproché. Peut-être l’apprendrons-nous à la barre... »


Me Gondran de Robert au premier plan
Me Gondran de Robert au premier plan
Me Gondran de Robert, avocat de Geffry Salmon
« Dans ce dossier il y a de graves manques d’éléments matériels et légaux. Je prends une image, lorsqu’au Mondial des joueurs de foot n’ont pas la tenue réglementaire, ils ne rentrent pas sur le terrain. Alors, lorsqu’une ordonnance de renvoi n’a pas la tenue réglementaire, on ne commence même pas le match. C’est regrettable car M. Salmon est innocent sur le fond, il l’aurait démontré, mais le travail était tellement mal fait pendant l’instruction que c’est avec bon espoir que nous attendons le résultat. »
« Pour condamner quelqu’un pénalement il faut trois ingrédients : il faut un texte ; il faut des faits : « est-ce que j’ai volé, est-ce que je n’ai pas volé » ; et troisièmement : « est-ce que j’avais l’intention de voler ». Si vous n’avez pas ces trois ingrédients cumulés, vous n’avez pas de condamnation. Et bien dans cette ordonnance de renvoi, vous le croyez ou pas mais sur la corruption ou sur le favoritisme il n’y a aucun des trois éléments. Au bout de 4 ans d’instruction c’est extrêmement choquant, et je pense que c’est du jamais vu pour un dossier aussi important. Je crois que ce dossier n’est pas à la mesure de ce que la Polynésie attendait. La justice c’est d’abord la rigueur, et quand n’y a pas de rigueur il ne peut pas y avoir de justice sereine. »

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Lundi 23 Juin 2014 à 16:07 | Lu 1611 fois